Ephéméride |Josef von Sternberg [29 Mai]

29 mai 1894

Naissance à Vienne de Josef von Sternberg, le cinéaste qui fit de Marlène Dietrich un mythe vivant.

La décennie au cours de laquelle il réalisa ses meilleures oeuvres – 1925-1935 – fut la période de la transition du cinéma muet au parlant. Von Sternberg réussit cette transition, bien que, ironiquement, il se souciait seulement de l’image visuelle sur l’écran: Von Sternberg dit un jour que l’importance du scénario pour un film était « nulle ». Pourtant, ses films les plus connus – ceux qu’il fit avec Marlene Dietrich – furent tous des films parlants.

Jonas Sternberg était le fils de Moïse Sternberg et de l’ancienne chanteuse Sérafine. Moïse était un ancien militaire de carrière de l’armée austro-hongroise qui passa les premières années de la vie de son fils à bouger sans cesse, traînant parfois sa famille avec lui, d’Autriche aux États-Unis et retour, en cherchant à gagner sa vie dans la vie civile.

Quand Jonas eut 14 ans, la famille s’installa définitivement à New York.

Malgré ses années passées en Autriche, Sternberg avait presque oublié son allemand à l’âge adulte, ce qui ne l’empêcha pas de revenir à Berlin pour tourner des films dans les années 1920. Il cultivait également un personnage d’aristocrate allemand, ajoutant la particule « von » à son nom en 1925, une idée qu’il copia d’Erich von Stroheim, un autre garçon juif de Vienne qui avait commencé son existence comme simple « Stroheim ».

Sternberg quitta son lycée Jamaica High School, dans le Queens, au bout d’une seule année et décrocha bientôt un travail de nettoyage et de réparation de copies de films. Lorsque le laboratoire pour lequel il travaillait fut acheté par World Film Co., une société de production et de distribution, il commença à gravir les échelons du cinéma.

Chez World Film, Sternberg travailla comme apprenti auprès de plusieurs réalisateurs français avant que l’un d’eux, Emile Chautard, ne le nomme réalisateur adjoint de son film de 1919, « Le mystère de la chambre jaune ». Le premier long métrage de Sternberg fut « The Salvation Hunters » (1925), une oeuvre silencieuse et allégorique sur l’amour et l’argent, les hommes et les femmes qui, malgré son petit budget, attirèrent l’attention de quelques grands acteurs de l’industrie.

À la fin des années 1920, Sternberg réalisa quatre films muets pour Paramount qui firent sa réputation: «The Last Command» et «The Docks of New York», et les films de gangsters «Underworld» (écrit par Ben Hecht) et «Thunderbolt».

A Hollywood, les choses ont toujours tourné vite. Quand les choses commencèrent à y ralentir pour von Sternberg, il partit pour Allemagne pour y réaliser « L’ange bleu » pour l’UFA, en anglais et en allemand.

C’était le premier film de Marlène Dietrich. Son interprétation de Lola Lola, qui pousse le distingué professeur Rath (Emil Jannings) à la déchéance morale, elle s’imposa immédiatement comme une séductrice insensible, un rôle qu’elle joua apparemment aussi dans la vie réelle, en particulier avec le malheureux Josef von Sternberg.

Bien que Sternberg le réalisateur, avait la réputation d’être austère et dictatorial sur le plateau (« la seule façon de réussir », disait-il, « c’est de vous faire haïr »), dans sa vie personnelle, c’était masochiste désespérément esclave de Marlène. Plus d’un historien du cinéma a observé que dans presque tous ses films, Sternberg s’est inspiré de sa vie personnelle pour peindre des protagonistes masculins régulièrement humiliés par les femmes.

Lui et Dietrich firent six autres films ensemble:
– « Morocco » (1930), une aventure romantique, sur l’amour entre une chanteuse de cabaret, Amy Jolly (Dietrich) et un soldat français de la Légion étrangère, Tom Brown (Gary Cooper). Morocco fut un succès au box-office, et Dietrich, dont l’image exotique de femme fatale avait été soigneusement conçue par Sternberg, devint instantanément une star d’Hollywood. Tous les deux, Dietrich et Sternberg furent nominés pour les Oscars.
– « Dishonored » (1931), une romance d’espionnage pendant la Première Guerre mondiale; – une espionne autrichienne, X-27 (Dietrich), tombe amoureuse du Colonel Kranau, un espion russe (Victor McLaglen) – fut une déception, avec un thème rebattu et un manque d’alchimie entre Dietrich et McLaglen, maladroit en espion fringant.
– Sternberg et Dietrich se retrouvèrent pour un résultat mémorable dans « Shanghai Express » (1932), une aventure exotique à bord d’un train qui traverse la Chine déchirée par la guerre. Dietrich y tint un de ses rôles les plus célèbres en Shanghai Lily, «la fleur blanche de la côte chinoise». Warner Oland et Anna Mae Wong livrèrent des interprétations mémorables en seigneur de guerre et prostituée. Le scénario de Jules Furthman et les images de Lee Garmes étaient également remarquables. Le film fut un succès au box-office et fut nominé pour l’Oscar de la meilleure photo. Sternberg reçut sa deuxième (et dernière) nomination pour la meilleure direction.
– « Blonde Venus » (1932) est un «film de femme» dans lequel Dietrich jouait une chanteuse de boîte de nuit qui sacrifie son honneur à un millionnaire (Cary Grant) afin de récolter des fonds pour soigner son mari malade (Herbert Marshall). La séquence dans laquelle Dietrich émerge d’un costume de gorille pour un de ses numéros est particulièrement remarquable.
– « The Scarlet Empress », (L’impératrice rouge) (1934) immerge la Catherine la Grande de Dietrich dans une myriade de fioritures stylistiques et de direction artistique ornementée. Malgré la dépense évidente, le film fut un échec commercial.
– La dernière collaboration entre Sternberg et Dietrich fut pour « The Devil is a Woman » (1935). On y voit le personnage de Dietrich endosser à nouveau le rôle de manipulatrice dominante et moqueuse des hommes que le public n’avait pas revu depuis L’Ange bleu. Dans la peau de la tentatrice Concha Pérez, elle émascule la fierté de l’Espagne du XIXe siècle, un officier distingué (Lionel Atwill) et un politicien radical (Cesar Romero). Le film futt un échec commercial, et Ernst Lubitsch, le chef de la production chez Paramount, renvoya Sternberg, mettant pour l’essentiel fin à sa carrière de réalisateur hollywoodien.
Ses films étaient trop abstraits et trop visuels pour attirer le grand public recherché par les studios.

Le dernier film de Von Sternberg fut « Ana-ta-han » en 1953, (bien que « Jet Pilot » soit sorti plus tard, en 1957). C’était un film indépendant qu’il réalisa au Japon, écrit, raconté et dirigé par lui-même. C’était l’histoire de 12 marins japonais échoués sur une île pendant sept ans après la Seconde Guerre mondiale. Le film fut un échec critique et financier.

Sternberg s’éteignit le 22 décembre 1969 à Hollywood à l’âge de 75 ans.