14 décembre 1799
Décès à Mount Vernon (Virginie) de George Washington, chef d’État-major de l’Armée continentale pendant la Guerre d’indépendance et premier Président des Etats unis d’Amérique.
Au matin du 17 août 1790, George Washington, élu président l’année précédente, arriva à Newport, Rhode Island. Il était accompagné du secrétaire d’État Thomas Jefferson, du gouverneur George Clinton de New York, du juge de la Cour suprême des États-Unis John Blair de Virginie et du député américain William Loughton Smith de la Caroline du Sud.
A l’époque, douze amendements à la Constitution, adoptée en 1788, avaient été proposés au Congrès. Le troisième amendement portait sur la question de la liberté de religion et de la presse. Le Congrès avait envoyé les douze amendements aux états pour ratification le 25 septembre 1789. Les législatures d’état étaient tenues d’examiner les amendements un par un et de les ratifier individuellement. Au cours des mois suivants, les états avaient renvoyé les amendements au Congrès, en ratifiant certains et en désapprouvant d’autres. Le 15 décembre 1791, la Virginie avait approuvé dix des douze amendements proposés et était devenue le dixième et dernier État requis pour que les amendements soient adoptés. Les deux premiers amendements proposés avaient été rejetés par les trois quarts de tous les États et n’avaient donc pu être adoptés. C’est ainsi que le troisième amendement original, interdisant l’établissement d’une religion d’état et garantissant la liberté de la presse, devint le fameux premier amendement. La Virginie, le Massachusetts, le Connecticut et la Géorgie discutaient encore des amendements en août 1790 lorsque le président arriva à Newport.
Washington fut accueilli par les principaux citoyens de Newport et les représentants des nombreuses affiliations religieuses présentes dans la ville, y compris les Juifs. Parmi eux se trouvait Moses Seixas, l’un des responsables de Yeshuat Israel, la première congrégation juive de Newport. Seixas déclara, au nom de la communauté juive:
« Privés, comme nous l’avons été jusqu’ici, des droits inestimables de citoyens libres, nous avons maintenant un gouvernement, érigé par la majesté du Peuple – un gouvernement qui ne tolère aucun sectarisme, qui n’appuie aucune persécution, mais accorde généreusement à tous la liberté de conscience et les immunités de la citoyenneté: considérant chacun, quelle que soit sa nation ou sa langue, comme des parties égales de la grande machine gouvernementale … »
Quelques jours après son départ de Newport, le président écrivit aux groupes de citoyens qui s’étaient adressés à lui à Newport, en les remerciant pour leur hospitalité et leur gentillesse. La première de ces lettres fut sa réponse aux Juifs.
Reprenant mot pour mot les paroles de Seixas et faisant écho aux termes de la déclaration d’Indépendance, Washington s’y exprimait dans des termes d’une clarté absolue.
« Les citoyens des États-Unis d’Amérique ont le droit de se féliciter d’avoir donné à l’humanité des exemples de politique ouverte et libérale: une politique digne d’imitation. Tous possèdent une même liberté de conscience et l’immunité de la citoyenneté. On ne parle plus maintenant de tolérance, comme si c’était par l’indulgence d’une catégorie de personnes, qu’une autre jouissait de l’exercice de ses droits naturels. Car heureusement, le gouvernement des États-Unis, qui ne tolère aucun sectarisme, qui n’appuie aucune persécution, exige seulement que ceux qui vivent sous sa protection se conduisent comme de bons citoyens, en lui donnant en toutes circonstances leur appui effectif. »
Et, reprenant les mots du prophète Michée, il concluait:
« Que les enfants du troupeau d’Abraham, qui demeurent dans ce pays, continuent à mériter et à jouir de la bonne volonté des autres habitants; tandis que chacun s’assiéra en sécurité sous sa propre vigne et son figuier, et qu’il n’y en aura aucun pour l’effrayer. »
En affirmant, non seulement le principe de la liberté de conscience mais l’égale dignité de tous les citoyens, la lettre de Washington aux Juifs de Newport, constitue un marqueur essentiel dans l’histoire de la démocratie américaine.
