Ephéméride |Bertha Kalich [17 Mai]

17 mai 1874

Naissance à Lemberg (aujourd’hui Lviv) de Bertha Kalich, la Sarah Bernhardt juive.

Connue pour son allure majestueuse, sa grande beauté et sa belle diction, Bertha Kalich fut la première femme à faire la transition entre la scène yiddish et la scène anglaise. Les critiques l’ont appelée la « Bernhardt juive » et elle-même a estimé plus tard qu’elle avait joué 125 rôles dans sept langues différentes pendant sa longue carrière théâtrale.
Kalich fut l’une des grandes vedettes de l’âge d’or du théâtre yiddish américain et, pendant un certain temps, une des principales figures du théâtre américain traditionnel.

Né Beylke Kalakh le 17 mai 1874 (selon certaines sources, 1872 ou 1875), à Lemberg, alors en Autriche-Hongrie, elle était l’unique enfant de Salomon Kalakh, un fabricant de brosses modeste et violoniste amateur, et de Babette ( Halber) Kalakh, une couturière qui faisait des costumes pour les théâtres locaux. Amateure d’opéra, Babette Kalakh conduisait souvent sa fille à des spectacles où l’enfant tomba amoureuse de la scène.

Bertha étudia la musique et le théâtre dans des écoles privées et fréquenta le Conservatoire de Lemberg. À l’âge de treize ans, elle rejoignit le chœur du théâtre polonais local. Elle joua ensuite en allemand.
Comme « prima donna » dans le groupe de théâtre yiddish pionnier de Yankev Ber Gimpel, elle joua le rôle-titre dans la Shulamith d’Avrom Goldfaden.
C’est à cette époque qu’elle adopta le nom de Bertha Kalich. Après avoir joué à Budapest, Kalich retourna à Lemberg pour intégrer la troupe de Goldfaden, avec qui elle partit pour la Roumanie. Là, elle apprit le roumain en quelques mois et joua un rôle majeur dans le théâtre d’État. Elle y eut un tel succès que les amateurs de théâtre antisémites, qui étaient venus avec l’intention de lui jeter des oignons, lui jetèrent des fleurs à la place.

En 1890, Kalich épousa Leopold Spachner. Le couple eut deux enfants, Arthur, qui est mort jeune, et Lillian.

Effrayée par la rumeur d’un complot d’assassinat par des rivales jalouses, Bertha accepta une offre de Joseph Edelstein de venir à New York se produire dans son théâtre Thalia.
Elle arriva aux États-Unis en 1894 (selon d’autres sources, 1895 ou 1896), paraissant dans Di Vilde Kenigin [La reine sauvage] et une production yiddish de La Belle Hélène. Elle tint également les rôles de Shulamith, Juliette et Desdemone.

En Amérique, Kalich chercha à mettre en valeur ses talents dramatiques plutôt que ses talents musicaux. Elle devint connue pour sa participation au mouvement pour un théâtre yiddish de qualité artistique supérieure à ce qui était commun à l’époque.
La performance de Kalich dans « The East Side Ghetto » de Leon Kobrin reçut un accueil favorable tant de la critique que du grand public. Elle se distingua notamment dans les œuvres du dramaturge Jacob Gordin, dont les pièces didactiques introduisaient des sujets sérieux sur la scène yiddish.
En 1900, elle joue le rôle de Freydenyu dans la première production de « Dieu, l’Homme et le Diable » de Gordin. Gordin écrivit le rôle d’Etty dans « La Sonate à Kreutzer » et le rôle-titre de sa « Sappho » spécialement pour elle.
Au fil des années, Kalich joua dans de nombreux autres rôles de Gordin. Elle parut également dans des pièces de Z. Libin, Dovid Pinsky, I.L. Peretz, et d’autres.

Pendant un certain temps, Kalich fut la partenaire de son mari et de plusieurs autres au Théâtre Thalia. En plus du Thalia, elle apparut à l’Opéra de Roumanie, au Grand Théâtre et ailleurs. Pendant au moins une saison, Spachner loua le Windsor Theatre en le renommant Théâtre Kalich.

Le travail de Kalich sur la scène yiddish attira l’attention d’éminents producteurs de théâtre anglophones. Son premier rôle en anglais fut celui du rôle-titre dans Fedora de Victorien Sardou à l’American Theatre en 1905.
Plus tard dans la même année, elle signa avec Harrison Gray Fiske et participa à la production de « Monna Vanna » de Maurice Maeterlinck au Manhattan Theatre.
Elle travailla pendant des mois avec Minnie Maddern Fiske pour corriger son accent étranger, un effort dans lequel elle réussit largement.
Au cours des années suivantes, Kalich joua pour Fiske un certain nombre de pièces, à la fois des œuvres originales et des adaptations de rôles qu’elle avait créés en yiddish.

A partir de 1910, cependant, elle eut du mal à trouver des rôles appropriés à son style plus émotionnel et tragique dans le théâtre américain léger.
Elle et Fiske se séparèrent, et sa carrière connut un recul. Au cours de la décennie suivante, Kalich travailla avec Lee Shubert et Arthur Hopkins, et elle fit des apparitions dans plusieurs premiers films.
En 1923, elle a joué dans « Jitta’s Atonement », adapté par George Bernard Shaw de l’œuvre de Siegfried Trebitsch. Ses autres rôles en anglais dans les années 1920 comprenaient des reprises de ses premiers succès tels que « La Sonate à Kreutzer ».

À partir de 1915, Kalich revint fréquemment à la scène yiddish. Là, son succès dans le monde théâtral américain accru son prestige. Elle joua au Second Avenue Theatre avec Dovid Kessler, au National Théatre de Boris Tomashefsky, au Irving Place Theatre et dans d’autres théâtres de New York, ainsi qu’à Philadelphie et à Chicago. Elle joua dans des pièces de Rose Shomer et Miriam Shomer-Zunser, Esther Steinberg, Peretz Hirshbein, Moyshe Shor, et d’autres.

À la fin des années 1920, la santé de Kalich commença à décliner et elle perdit graduellement la vue. Elle annonça sa retraite en 1931, mais remonta sur la scène de temps en temps par la suite, particulièrement à plusieurs soirées organisées par la communauté théâtrale spécialement pour elle.
Elle joua également des scènes des pièces historiques de Goldfaden dans « The Forward Hour » sur la station de radio WEVD, répétant même avec ardeur des pièces courtes.
Sa dernière apparition eut lieu le 23 février 1939, dans une soirée à son bénéfice, au théâtre Jolson, lorsqu’elle récita la dernière scène du poème de Louis Untermeyer, «La mort de Heine».

Bertha Kalich mourut le 18 avril 1939. 1500 personnes seulement assistèrent à son enterrement, ce qui fut considéré comme une participation décevante.
À cette époque, elle semblait être une relique du passé théâtral, avec un style trop romantique et grandiose même pour la scène yiddish.
Néanmoins, au sommet de sa carrière au début du XXe siècle, Kalich joua un rôle important dans les efforts visant à améliorer les standards artistiques du théâtre yiddish, dont elle aida également à élever le statut auprès de publics anglophones.

(Source: Daniel Soyer in Jewish Women’s Archive)