Ephéméride | Martin H. Glynn [27 Septembre]

27 septembre 1871

Naissance à Kinderhook (Etat de New-York) de Martin H. Glynn, premier gouverneur catholique dans l’histoire des Etats-Unis. En 1919, il publia dans l’hebdomadaire « American Hebrew », un éditorial retentissant et prémonitoire, « La crucifixion des Juifs doit cesser! »

Glynn naquit dans la ville de Kinderhook, New York, et grandit dans l’un des villages de Kinderhook, le village de Valatie. Il était le fils de Martin Glynn et d’Ann Scanlon, tous deux nés en Irlande.

Diplômé de l’Université Fordham en 1894, il étudia ensuite à la faculté de droit de la Union University d’Albany et fut admis au barreau en 1897. À partir de 1896, il écrivit pour le quotidien Albany Times-Union, dont il devint par la suite, rédacteur en chef, directeur et propriétaire.

Glynn fut élu pour le parti démocrate au 56e Congrès des États-Unis et siégea du 4 mars 1899 au 3 mars 1901. Lorsqu’il prit son siège à 26 ans, Glynn était le plus jeune membre de la Chambre. Il fut contrôleur de l’État de New York de 1907 à 1908, élu en 1906, mais échoua pour sa réélection en 1908 contre le républicain Charles H. Gaus.

Il fut élu gouverneur adjoint de l’état de New York en 1912 avec William Sulzer, et lui succéda lors de la destitution de Sulzer en 1913. Il fut le premier gouverneur catholique de New York, mais fut battu pour sa réélection par Charles. S. Whitman en 1914.

Il fut délégué aux congrès nationaux démocrates de 1916 et de 1924. Orateur principal à la Convention nationale démocrate de 1916, Glynn prononça l’un de ses discours les plus célèbres, faisant l’éloge des réalisations du président Woodrow Wilson et du programme du Parti démocrate.

Martin Glynn participa activement au mouvement progressiste et s’intéressa en particulier aux affaires américano-irlandaises.

Voici une traduction de son fameux article paru dans l’édition du 31 octobre 1919 du « American Hebrew ».

LA CRUCIFIXION DES JUIFS DOIT CESSER!

De l’autre côté de la mer, six millions d’hommes et de femmes nous demandent de l’aide et huit cent mille petits enfants pleurent pour avoir du pain.

Ces enfants, ces hommes et ces femmes sont nos camarades de la famille humaine, avec le même droit à la vie que nous, la même sensibilité au froid de l’hiver, la même faculté de mourir sous les crocs de la faim. En leur sein résident les possibilités illimitées pour l’avancement de l’espèce humaine, qui résident naturellement en six millions d’êtres humains. Nous ne sommes peut-être pas leurs gardiens, mais nous devrions être leurs appuis.

Face à la mort, aux souffrances de la famine, il n’y a pas de place pour les distinctions mentales de croyance, pas de place pour les différenciations physiques de race. Dans cette catastrophe, quand six millions d’êtres humains sont entraînés vers la tombe par un destin cruel et implacable, seules les penchants les plus idéalistes de la nature humaine devraient influencer le cœur et guider la main.

Six millions d’hommes et de femmes meurent par manque des produits de première nécessité; huit cent mille enfants pleurent pour du pain. Et ce destin plane sur eux sans aucune faute de leur part, sans aucune transgression des lois divines ou humaines; mais par la terrible tyrannie de la guerre et la soif fanatique de sang juif.

Face à cette menace d’holocauste de la vie humaine, foin des subtilités des distinctions philosophiques, foin des différences d’interprétation historique; la détermination à défendre les sans-défense, à abriter les sans-abris, à vêtir ceux qui sont nus et à nourrir ceux qui ont faim devient une religion sur l’autel de laquelle les hommes de toutes races peuvent prier et devant laquelle les femmes de toutes croyances peuvent s’agenouiller. Dans cette calamité, la fugacité des modes humaines disparait devant les vérités éternelles de la vie et nous prenons conscience que de la main d’un même Dieu nous provenons tous et que nous nous tiendrons tous devant le tribunal d’un même Dieu au jour du Jugement. Et quand ce jugement viendra, la simple protestation des lèvres ne vaudra pas un centime; mais les actes, les simples actes intangibles, les actes qui sèchent les larmes de douleur et apaisent les souffrances de l’angoisse, les actes qui, dans l’esprit du bon Samaritain, versent de l’huile et du vin sur les plaies, et procurent subsistance et abri aux affligés et aux sinistrés qui l’emporteront sur toutes les étoiles dans les cieux, toutes les eaux dans les mers, toutes les roches et tous les métaux dans tous les globes célestes qui tournent dans le firmament qui nous entoure.

La race est une affaire d’accident; la croyance, en partie une question d’héritage, en partie une question d’entourage, en partie le résultat d’une déduction; mais nos désirs physiques et nos besoins corporels sont implantés en chacun de nous par la main de Dieu, et l’homme ou la femme qui peut et ne veut pas entendre le cri des affamés; qui peut et ne veut pas prendre garde aux lamentations des mourants; qui peut, et ne veut pas, donner la main à ceux qui sombrent sous les vagues de l’adversité est un assassin des meilleurs instincts de la nature humaine, un traître à la cause de la famille humaine et un renégat de la loi naturelle inscrite sur les tablettes de chaque coeur humain par le doigt de Dieu lui-même.

Et ainsi, dans l’esprit qui a transformé l’offrande de la pauvre veuve de cuivre en argent et d’argent en or quand elle fut placée sur l’autel de Dieu, les gens de ce pays sont appelés à sanctifier leur argent en donnant 35 000 000 $, au nom de l’humanité de Moïse, à six millions d’hommes et de femmes affamés.

Six millions d’hommes et de femmes meurent – huit cent mille petits enfants pleurent pour du pain.

Et pourquoi?

A cause d’une guerre pour renverser l’autocratie dans la poussière et donner à la démocratie le sceptre du juste.

Et dans cette guerre pour la démocratie, 200 000 jeunes Juifs des États-Unis se sont battus sous la bannière étoilée. Dans la seule 77ème Division, il y en avait 14 000 et dans la forêt d’Argonne, cette division captura 54 canons allemands. Cela montre que dans l’Argonne, les garçons juifs des États-Unis combattirent pour la démocratie comme Josué combattit les Amalécites dans les plaines d’Abraham. Dans un discours sur l’ainsi dénommé « Bataillon perdu », commandé par le colonel Whittlesey de Pittsfield, le major-général Alexander montra l’esprit de combat dont ces garçons juifs étaient faits. D’une manière ou d’une autre, les forces de Whittlesey était encerclées. Elles étaient à court de rations. Elles tentèrent de faire savoir à l’arrière la difficulté de leur situation. Ils essayèrent et essayèrent, mais les hommes ne réussissaient pas à traverser les lignes. La paralysie, la stupéfaction et le désespoir étaient dans l’air. Et quand l’heure était la plus sombre et que tout semblait perdu, un soldat s’avança et dit au colonel Whittlesey: « Je vais essayer de passer. » Il essaya, il fut blessé, il dût ramper et ramper, mais il réussit. Aujourd’hui, il porte la Distinguished Service Cross et son nom est

ABRAHAM KROTOSHINSKY.

En raison de cette guerre pour la démocratie, six millions d’hommes et de femmes juifs meurent de faim de l’autre côté des mers. Huit cent mille bébés juifs pleurent pour du pain.

Au nom d’Abraham Krotoshinsky qui a sauvé le « Bataillon Perdu », au nom des cent quatre-vingt-dix-neuf mille neuf cent quatre-vingt-dix-neuf autres Juifs qui ont combattu pour la démocratie sous la bannière étoilée, ne donnerez-vous pas du cuivre ou de l’argent ou de l’or pour garder la vie dans le cœur de ces hommes et de ces femmes; pour garder le sang dans le corps de ces bébés?

LE JUIF A AIDÉ TOUT LE MONDE SAUF LE JUIF.

Dans la guerre mondiale, le Juif a aidé tout le monde sauf les Juifs. « Là-bas » il aida au campement, au conseil et au conflit. « Là-bas », il aida la Croix-Rouge, le Y.M.C.A., les Chevaliers de Colomb, les Maçons, l’Armée du Salut et tous les autres. Alors maintenant, il est temps que tout le monde aide le Juif, et Dieu sait que c’est le moment où il en a besoin.

Dans les ténèbres de cette guerre, tous les autres peuples, sauf un ou deux, ont reçu un rayon de soleil. Mais au milieu des ténèbres qui l’environnent, il n’y a pas un rai de lumière pour guider le Juif vers le salut. La guerre est finie pour tout le monde, sauf pour les Juifs. Le couteau est toujours sur sa gorge et une soif séculaire irrationnelle et irraisonnée de sang juif lui ouvre les veines. Le Juif, en Roumanie, en Pologne et en Ukraine est le bouc émissaire de la guerre. Depuis que l’armistice a été signé, des milliers de Juifs en Ukraine ont été offerts en sacrifices vivants à la cupidité diabolique et à la passion fanatique – leurs gorges tranchées, leurs corps démembrés par des bandes d’assassins et une soldatesque enragée. Un jour, dans la ville de Proskunoff, il y a quelques semaines, l’aube a vu la porte de chaque maison où vivait un Juif marquée pour la boucherie. Pendant quatre jours, du lever au coucher du soleil, les fanatiques manièrent le poignard comme des démons de l’enfer, ne s’arrêtant que pour se sustenter les mains dégoulinantes du sang des victimes juives. Ils tuèrent les hommes; ils furent moins miséricordieux envers les femmes. Celles-ci, ils les violèrent d’abord, et les tuèrent ensuite. D’abord un objectif, puis une furie, puis une routine, ce meurtre des Juifs se poursuivit, jusqu’à ce que, au bout de quatre jours, les rues de Proskunoff soient rouges de sang comme les caniveaux d’un abattoir, jusqu’à ce que ses maisons deviennent une morgue pour des milliers d’êtres humains massacrés, dont les plaies béantes criaient vengeance et dont les yeux s’étaient changés en pierres devant les horreurs qu’ils avaient vues. Comme l’a déclaré l’honorable Simon W. Rosendale, paraphrasant avec justesse la pensée de Bobby Burns, dans son récent discours, c’est l’histoire éternelle de « l’inhumanité de l’homme envers les hommes qui endeuille des milliers de gens ». Car comme il en fut à Proskunoff, il en fut de même dans cent autres endroits. L’histoire sanglante se répétant jusqu’à la nausée. C’est la même histoire souillée de larmes – la même vieille souillure sur le blason de l’humanité.
En vérité, Byron avait raison quand il écrivait:

« Tribus des pieds errants et des poitrines fatiguées
Où fuirez-vous pour trouver le repos?
La colombe sauvage a son nid, le renard sa tanière,
L’humanité, ses pays, Israël rien que la tombe. »

Mais Israël a droit à une place au soleil et la crucifixion des Juifs doit cesser. Nous répétons que la guerre est terminée pour tout le monde, sauf pour les Juifs. Comme Isaac, le couteau est sur sa gorge, mais contrairement à Isaac, aucun pouvoir ne semble pouvoir empêcher l’acier de s’abreuver de son sang. Mais il faut que le monde rassemble quelque puissance pour empêcher cette décimation d’une race méritante. Pour la paix du monde, bâtissons une Société des Nations à tout prix; mais pour l’Humanité du Monde, pour rendre justice aux Juifs et aux autres peuples opprimés de la terre, faisons une Trêve de Dieu!

Albany Times Union, 31 octobre 1919.

Glynn se suicida par balle le 14 décembre 1924, à l’âge de 53 ans, après avoir souffert tout au long de sa vie d’adulte le calvaire de douleurs chroniques au dos causées par une blessure à la colonne vertébrale. C’était un mentsh.