Le Yiddish, une parole perdue ?
Pour entrer dans le vif du sujet, il est nécessaire de
rappeler quelques éléments pour comprendre la
situation du yiddish…
Le yiddish est une langue millénaire. A ce titre, elle a une
histoire comparable à beaucoup d’autres langues
européennes.
Durant 10 siècles, elle a été la langue du peuple juif
d’Europe centrale et orientale. Elle a joué pour ce peuple
juif, dispersé sur plusieurs états, sur plusieurs empires,
un rôle unificateur lui permettant de communiquer sur
tous les aspects de vie quotidienne et d’exprimer ses
rêves, ses aspirations, ses angoisses, ses espoirs, son
identité… bref d’être le vecteur de la « Yiddishkeit »,
d’être la langue du monde ashkénaze.
A l’apogée de son existence, en 1939, le yiddish était
parlé par 11 à 12 millions de yiddishophones dans le
monde, essentiellement en Europe Centrale et
Orientale.
En 1939 : 17 millions de juifs dans le monde dont 60%
en Europe, 30% aux USA, 10% dans le reste du monde !
En 1939 : plus de 40 quotidiens en yiddish, plus de 450
revues diverses, littérature, théâtre, chanson, cinéma…
Il resterait aujourd’hui moins de 2 millions de
yiddishophones, essentiellement aux USA et en Israël et
le yiddish a perdu son statut de « mame-loshn », de
langue maternelle !
Il faut remarquer que la situation actuelle du yiddish est
comparable à celles des autres langues juives qui,
comme le yiddish, se sont constituées à partir des
idiomes en usage dans les pays de diaspora : le
djudezmo et le judéo-arabe maghrébin sont des langues
moribondes…
Disparition totale du judéo-roman (ou sarphatique ou
laaz) parlé au Moyen-Âge… Cf. les commentaires de
RACHI (Salomon Ben Isaac), rabbin-vigneron qui a vécu
à Troyes au XIème siècle.
Le lieu du yiddish pose lui-même un problème.
Généralement à une langue, correspond un lieu, un pays
aux contours précis.
Max WEINREICH (fondateur du YIVO, auteur d’une
histoire du yiddish dans les années 40) : « une langue
est un dialecte qui a son armée et sa marine » !
En ce qui concerne le yiddish, il y a un problème de
détermination et de dénomination du lieu (ou des lieux)
… Pour désigner le lieu du yiddish, on utilise le terme de
« Yiddishland ». le mot ne renvoie à aucun état précis, à
aucune nation constituée. Il évoque un territoire
quasiment mythique, sans frontières, sans bornes
précises.
Et si l’on doit malgré tout tenter une définition du lieu à
partir des territoires formant le Yiddishland, les noms
évoquent une géographique dont nous ne possédons
plus ni les frontières ni la localisation précise : la
Bucovine, la Bessarabie, la Galicie, la Volhynie…
Territoires oubliés aux contours incertains dont la
toponymie révèle ce sentiment nostalgique
d’effacement, d’absence et de perte… Et pour
compliquer les choses, le « Yiddishland » ne délimite
pas le seul espace du yiddish : dès la fin du XIXème
siècle, on parle yiddish en dehors du continent
européen : New York est, au tournant du siècle, la plus
grande ville yiddishophone avec Varsovie, et en 1906,
l’Afrique du Sud, devant l’afflux de réfugiés juifs fuyant
l’antisémitisme régnant en Europe, accorde au yiddish
un statut de quasi langue officielle (avec d’autres
langues).
Il y a aujourd’hui, cet étrange et singulier paradoxe,
produit d’une tragédie sans précédent dans l’histoire,
qui fait que le yiddish ne reste parlé qu’en dehors des
territoires où il est né, s’est développé et a atteint, non
pas son apogée (qui sait ce que serait devenue cette
langue sans la folie meurtrière, politiquement,
militairement, économiquement et industriellement
organisée, des nazis et de leurs affidés), mais le stade
de langue vernaculaire de tout un peuple. A la fin, il y a
cette impression d’un monde mythique perdu, disparu,
englouti…
Pourtant ce monde a existé et le peuple qui le
constituait, qui lui donnait une existence, parlait une
langue, le yiddish !
Alors d’où vient le yiddish, le « jüddische Deutsch », la
« loshn ashkénaze » ?
Originellement le yiddish, se constitue vers les X et
XIème siècles à la suite de la migration de juifs du nord
de la France et du nord de l’Italie vers la Rhénanie. Ceux-
ci, en contact avec les parlers germaniques de la vallée
du Rhin, vont créer une nouvelle langue. Le premier
texte identifiable en yiddish date de 1272 et figure dans
un livre de la ville allemande de Worms…
Très rapidement le yiddish va évoluer, en particulier au
XIV siècle, suite aux migrations des juifs d’Allemagne
vers l’Europe centrale.
( persécutions au Moyen-âge… Conciles de Latran en
1179 et 1215 : les « ghettos »… La Peste noire en 1349…)
Cela va conduire à distinguer différents dialectes au
sein de la langue yiddish : le yiddish occidental et
yiddish oriental. L’histoire va conduire à ce que le
yiddish oriental s’impose et à ce que, progressivement
le yiddish occidental s’efface….
Indépendamment de ces structurations géographiques,
le yiddish va s’organiser en 4 périodes selon le linguiste
Max WEINREICH :
- Le pré- yiddish avant 1250
- Le yiddish ancien entre 1250 et 1500
- Le moyen yiddish entre 1500 et 1750
- Le yiddish moderne à partir de 1750
En réalité, le yiddish connaît l’évolution linguistique de
nombreuses autres langues et à ce titre, il est bien une
langue européenne.
C’est à partir de 1750 que le yiddish va connaître son
âge d’or en Europe centrale et orientale (en particulier
en Pologne, Lituanie et Ukraine) alors que
paradoxalement il tend à s’effacer dans son berceau
d’origine en Allemagne et dans les Provinces Unies. Une
abondante et foisonnante littérature se développe dès la
fin du XVIIIème siècle et va s’épanouir entre le milieu du
XIXème et la 2nde guerre mondiale. C’est durant cette
période que les grands noms de la littérature yiddish
vont créer leurs œuvres romanesques et poétiques.
Mendele MOIKHER SFORIM, Ytzaak LEIB PERETZ et
Sholem ALEIKHEM sont les « classiques » de cette
littérature yiddish.
Le développement du yiddish conduit plusieurs
intellectuels yiddishophones à mettre en œuvre une
unification du yiddish, c’est-à-dire à lui donner un statut
de langue nationale à part entière pour les juifs.
En 1908, à l’initiative de Nathan BIRNBAUM se tient la
conférence de Czernowitz (ville qui se trouve dans
l’actuelle Ukraine). Le texte de l’invitation montre l’enjeu
de cette conférence : « tandis que des langues plus
anciennes étaient « surveillées comme un enfant
précieux », le yiddish a été abandonné à lui-même, libre
de vagabonder dans l’univers linguistique, au risque de
contracter toutes sortes de maux et peut-être même d’y
trouver la mort. (…) Les règles vivantes de la langue (…)
ne sont jamais consignées, aussi semble-t-elle en être
tout à fait dépourvue. Chacun l’écrit à sa manière, selon
son gré, en l’absence de toute orthographe établie et
faisant autorité. »
Globalement le yiddish reste marqué par son caractère
de langue populaire, de jargon du shtetl et il faut
l’émanciper de son origine triviale pour la policer et
qu’elle devienne langue nationale.
Mais l’opposition entre sionistes (partisans de l’hébreu)
et les défenseurs du yiddish ne permet pas d’arriver à
une reconnaissance officielle du yiddish
comme la langue nationale du peuple juif.
I.L. PERETZ : « nous le proclamons au monde : nous
sommes le peuple juif et le yiddish est notre langue ! »
Le yiddish ne sera tout juste considéré que
comme une des langues juives : la distinction est de
taille !
Pour que le yiddish soit reconnu langue nationale d’un
territoire, il faut attendre 1928… C’est à cette époque que
STALINE décide de créer une région autonome juive
au… Birobidjan (à plus de 10 000 km du Yiddishland) !
Au maximum de la « colonisation juive » en 1948, la
communauté yiddishophone n’excèdera pas 30 000
personnes sur 185 000 habitants. Evidemment les juifs
du Birobidjan vont connaître tous les drames et subir
toutes les conséquences de la dictature stalinienne.
Durant la 2nde guerre mondiale, dans les pays occupés
par les nazis, la Shoah va pratiquement faire disparaître
le yiddish d’Europe.
En 1946 en Pologne = 250 000 juifs (sur plus de 3,5
millions avant la guerre !). Le nombre tombe à 80 000 au
début des années 50… Aujourd’hui à peine 30 000 ???
En Ukraine, aujourd’hui seulement 2% de
yiddishophones sur l’ensemble de la population juive.
En France entre 60 et 80 000 ???
Les lieux du yiddish sont aujourd’hui essentiellement les
USA et Israël.
Qu’est-ce que le yiddish ?
Une première observation pour souligner un paradoxe.
Compte tenu du fait que le yiddish est constitué à 80%
d’allemand, il s’agit donc d’une langue que les
populations juives d’Europe ont forgée à partir de la
langue d’un autre peuple non juif : on a donc constitué
le moyen d’expression de l’identité juive à partir d’une
langue de « Gentils ». il y a dans cette démarche une
dialectique révélatrice de la « Yiddishkeit » : elle
témoigne de la volonté de s’intégrer dans un ensemble
tout en cherchant à conserver sa propre identité… En
quelque sorte, être comme les autres, avec les autres et
en même temps être différents d’eux et continuer à être
soi-même !
Le yiddish est donc une langue faite d’apports divers :
c’est une langue de fusion (shmeltssprakh). C’est 80%
d’allemand, 10% de slavismes et 10% d’hébreu.
S’il est une langue germanique, le yiddish se distingue
nettement de l’allemand. Les mots d’origine
germaniques sont bien des mots yiddish qui ont connu
leur évolution propre et qui ont des sens renvoyant à
l’identité, à la culture, à la vie des populations juives
parlant le yiddish.
N’entrons pas dans les détails linguistiques… Rappelons
simplement que le yiddish a gardé de l’allemand les 3
genres (masculin, féminin et neutre) tout en
abandonnant les déclinaisons et en simplifiant le
système des conjugaisons. De l’hébreu, outre certains
termes, il garde en partie les pluriels. Du slave, là aussi
outre certains termes, il a emprunté plusieurs
tournures… Enfin le yiddish, langue du groupe des
langues germaniques, s’écrit avec l’alphabet hébraïque
(donc de droite vers la gauche) mais marque les
voyelles.
Au-delà de ces quelques considérations linguistiques, le
yiddish, c’est aussi une façon de s’exprimer propre à un
peuple et sa culture…
Le yiddish ne se réduit pas à des considérants
linguistiques. Il a été au centre d’un débat sur sa nature
et son devenir dès le XVIIIème siècle.
Le yiddish est marqué dès le début par son caractère
profane en opposition au caractère sacré, liturgique de
l’hébreu. Il sera stigmatisé par cet apriori négatif de
langue usuelle et populaire, de langue du « shtetl », de
langue abâtardie, de langues des « bonnes femmes » et
de la plèbe…
Mais au XVIIIème siècle cette perception négative va
s’accentuer avec le mouvement des « Lumières juives »,
la Haskala. Les Maskilim (partisans de la Haskala), dans
leur désir d’émancipation des populations juives, se
déclarèrent hostiles au yiddish (qu’ils appelaient « le
jargon »).
Ainsi pour Moïse MENDELSSOHN (1729-1786), il faut
abandonner le yiddish : « Je crains fort que ce jargon
n’ait pas peu contribué à la grossièreté de l’homme du
commun et j’augure de bons résultats de l’usage
croissant de l’allemand vernaculaire pur parmi mes
frères ». Un des disciples de MENDELSSOHN, David
FRIEDLANDER confirme ce mouvement quelques
années plus tard en 1798 : « le judéo-allemand qui a
cours parmi nous, cette langue dépourvue de règle,
bâtarde et inintelligible hors de notre cercle, doit être
complètement bannie ».
Mais à la même époque, un autre mouvement voit le
jour parmi les populations juives d’Europe centrale et
orientale : le Hassidisme… Ce mouvement religieux
mystique se heurte évidemment à la Haskala,
mouvement laïque et réformateur. Et les Hassidim vont
se faire les défenseurs du yiddish : pour se faire
comprendre du peuple, il faut parler la langue du
peuple ! Le Rabbin Nakhman de
Bratslav, écrit au sujet du Hassid : « Dans la langue
sacrée, il lui sera difficile de dire tout ce qu’il souhaite et
il sera empêché d’être aussi sincère puisque nous ne
parlons pas la langue sacrée… En yiddish, en revanche,
il est possible de laisser couler ses paroles et de dire
tout ce que l’on a dans le cœur devant le
Seigneur ». Et il ajoute : « En yiddish, il est plus facile
d’ouvrir son cœur ! ».
Même si le Hassidisme ne submerge pas la spiritualité
religieuse juive, il a le mérite d’avoir contribué
activement à l’identité communautaire, en particulier en
donnant au yiddish une place centrale et un statut qui le
dégage des aprioris négatifs portés à son encontre.
Un siècle plus tard, un autre débat va remettre sur le
devant de la scène la question de la place du yiddish…
En 1897, la tenue du 1er congrès international sioniste
sous l’égide de Théodore HERZL, outre qu’il pose la
question du droit pour les juifs d’avoir une patrie
gouvernée par eux-mêmes, aborde le problème de la
langue nationale. La question est d’autant plus sensible
que c’est l’époque de la renaissance de l’hébreu à
l’initiative d’Eliezer PERELMAN (qui va se faire appeler
Eliezer BEN YEHUDA).
Très rapidement les sionistes, en particulier pour ceux
qui commencent à émigrer en Palestine, l’hébreu va
devenir la langue nationale. Dans ce débat, le yiddish
reçoit l’appui des Bundistes qui considèrent le sionisme
comme une aventure dangereuse et qui sont favorables
à la conquête des droits pour les travailleurs juifs dans
le cadre de l’espace territorial où ils vivent. A ce titre ils
affirment que le yiddish est la langue du peuple juif.
Mais en dehors de ces tribulations où, à chaque fois, le
yiddish est mis en cause, l’histoire dramatique du
XXème siècle va avoir des conséquences tragiques
pour les populations juives d’Europe et par voie de
conséquence pour leur langue.
La politique meurtrière des nazis d’extermination des
juifs va entraîner le massacre de 6 millions de juifs
européens… Si l’on tue ceux qui parlent une langue,
cette langue a toutes les chances de disparaître à son
tour. Entre 1933 et 1945, les ¾ des yiddishophones
d’Europe disparaissent. En yiddish, la Shoah est
désignée comme « der driter Khurbn », la 3ème
destruction !
« Et la langue était perdue, assassinée. La langue – un
musée. De quelle autre langue pouvait-on dire qu’elle
était morte, de mort soudaine et incontestable au cours
d’une décennie donnée, sur un bout de terre donné ? (…)
Mesdames, Messieurs, ils ont excisé mes cordes
vocales, la seule langue dans laquelle je puisse vous
parler librement et couramment, mon mameloshn chéri
(…). Si ma langue n’a point de secrets pour vous,
Mesdames, Messieurs, c’est que vous êtes des
fantômes, des ectoplasmes, des spectres… ! ». Voilà
comment s’exprime, pour décrire cette béance, Cynthia
OZICK dans le traducteur introuvable ou le yiddish en
Amérique.
Mais le drame ne s’arrête pas, avec l’effondrement du
nazisme et la fin de la guerre. En URSS, les juifs, qui
avaient pu bénéficier au début de la Révolution
soviétique d’une amélioration de leur situation, vont être
victime de la politique antisémite de STALINE. Quelques
années après la guerre, le Comité antifasciste juif va
être liquidé au nom de la lutte contre le « nationalisme
bourgeois et le cosmopolitisme sans racines ». Les
intellectuels et artistes yiddishophones sont arrêtés et
exécutés : on estime que 400 écrivains, éditeurs et
personnalités du monde culturel yiddish ont été
massacrés. Toutes les institutions et infrastructures
yiddish sont interdites et démantelées et la littérature
yiddish est réduite au silence…
Alors le yiddish est-elle une parole perdue ???
Oui si on considère que le yiddish c’est la langue du
« shtetl », la langue du Yiddishland… c’est-à-dire la
langue d’un monde disparu.
Il faut ajouter ce paradoxe : le yiddish a été la langue du
peuple juif pendant 1000 ans… mais il n’est pas la
langue officielle de l’Etat d’Israël ! Aucun statut
particulier ne lui est reconnu.
Mais, même en danger de disparition, on continue de
parler, ici ou là, en yiddish. Les « foyers » yiddish, les
USA et Israël, se trouvent loin de la terre d’origine… Le
yiddish est une langue de l’exil… Pensons aux vers du
poète Morris
ROSENFELD : « mon cher viatique, ô ma langue yiddish »
. Le yiddish étant la langue d’un peuple diasporique
occupe une place de langue permettant de transmettre
une expérience à valeur universelle…
Le yiddish garde singulièrement une place à part dans le
cœur des juifs et des non-juifs… Quelque part le yiddish
continue d’exister par l’idée que nous en avons… L’idée
que rien de ce qui touche à la condition humaine n’est à
négliger, que le plus humble besoin des hommes mérite
tout autant d’être reconnu que ses aspirations les plus
hautes, voilà ce qu’exprime le yiddish… Parler la
« mameloshn » ne signifie pas obligatoirement « parler
le yiddish »… mais plus simplement apprécier et cultiver
la valeur universelle et humaine de cette langue, moyen
d’expression d’un peuple apatride.
Pour conclure, deux auteurs…
D’abord Sholem ALEIKHEM qui fait monologuer à
longueur de pages son personnage Téviè le
laitier : « comme il est dit à Yom Kippour, le Seigneur
décide qui va à cheval et qui se traîne à
pied… L’important, c’est d’espérer ! Un juif doit toujours
espérer, ne jamais perdre espoir ».
Ces mots font écho à ceux I.B. SINGER, prix Nobel de
Littérature en 1978, lors de son discours, fait en partie
en yiddish, à Stockholm :
« Le grand honneur qui m’est accordé par l’Académie de
Suède est aussi une reconnaissance de la langue
yiddish – une langue de l’exil, sans patrie, sans
frontières, privée du soutien de quelque gouvernement
que ce soit, une langue qui ne possède aucun mot pour
désigner les armes, les munitions, les manœuvres
militaires, les tactiques de guerre… (…).
On trouve dans la langue et dans le mode de vie yiddish
l’expression d’une joie pieuse, d’un appétit de vivre,
d’une connaissance profonde de l’être humain en tant
qu’individu… Il y a un humour paisible dans le yiddish,
une gratitude pour chaque jour de l’existence, pour
chaque miette de succès, pour chaque rencontre de
l’amour… L’état d’esprit yiddish n’a rien de hautain. Il ne
considère pas chaque victoire comme allant de soi. Il
n’exige ni n’ordonne mais se faufile, s’esquive, s’efforce
de passer inaperçu à travers les puissances
destructrices…
Le yiddish n’a pas dit son dernier mot. Il recèle des
trésors qui n’ont pas encore été révélés aux regards du
monde. Ce fut la langue des martyrs et des saints, des
rêveurs et des cabalistes, riche d’un humour et de
souvenirs que l’humanité n’oubliera jamais.
D’une certaine façon, le yiddish est notre langue à tous,
une langue humble et sage, le langage de l’humanité
remplie d’effroi et d’espérance ».
